Redécouverte des poètes d’Orient - Hafez de Chiraz
"Je ne peux plus me dire chrétien, hindou, musulman, bouddhiste ou juif...
L'amour m'a si complètement lié d'amitié,
Il m'a transformé en cendres et m'a libéré
De chaque concept et image que mon esprit ait jamais connus."
Un Maître de la Poésie Lyrique
Hafez, de son vrai nom Shams al-Din Muhammad, est né dans une famille modeste à Chiraz, une ville reconnue pour son bouillonnement culturel et intellectuel. Si nous le mentionnons, c’est parce que son éducation a été influencée par cet environnement, notamment à travers l'étude du Coran, d'où provient son surnom "Hafez", signifiant "celui qui a mémorisé le Coran". En effet, la théologie, la littérature et les sciences coraniques ont constitué une part importante de son apprentissage, influençant profondément sa poésie.
Hafez est rapidement reconnu pour son talent exceptionnel à manier les mots, alliant spiritualité et amour dans ses vers. La mystique soufie, très présente dans ses écrits, lui a permis de transgresser les frontières entre le sacré et le profane. Dès ses premières œuvres, il mêle la recherche de l’amour divin avec des métaphores sur l’amour terrestre, transcendant ainsi les limites traditionnelles de la poésie religieuse. Il est primordial de comprendre que l’influence du soufisme, un courant mystique de l’islam, est fondamentale dans l’œuvre d'Hafez. Ce dernier utilise des métaphores et des symboles pour évoquer la quête spirituelle, tout en restant accessible au lecteur par ses références à la vie quotidienne, à la nature, et aux émotions humaines. Par exemple, le vin et l’ivresse, des thèmes récurrents dans ses poèmes, représentent la dissolution de l’ego et l’union mystique avec le divin, une image controversée mais puissante dans le contexte islamique. Ci-dessous, deux vers de Hafez permettant de comprendre l’essence même de sa nature et qui vaudra bien mieux qu’une biographie :
« Le jour où je vins au monde, un désir d’amour s’est éveillé, De cet amour j’ai pris un goût qui ne s’éteindra jamais. »
Le Divân, oeuvre d’une vie
L'une de ses contributions les plus célèbres est son recueil intitulé "Divân de Hafez", qui rassemble ses poèmes. Ce recueil est devenu une référence incontournable en Iran, au point qu'il est couramment consulté lors d'occasions importantes, comme le Nouvel An persan.
Le Divan de Hafez contient environ 500 ghazals, bien que le nombre exact puisse varier selon les éditions et les compilations. Les ghazals sont principalement centrés sur deux thèmes principaux : l'amour (terrestre et divin) et le soufisme (la quête mystique de l'union avec Dieu). Hafez manie l’art du ghazal avec une subtilité unique, réussissant à fusionner des éléments spirituels et matériels, profanes et mystiques, tout en respectant la structure rigide de cette forme poétique. De plus, les poèmes du Divan sont souvent construits autour de métaphores et de symboles : le vin, la taverne, l'ivresse, le jardin, le rossignol, et la rose reviennent fréquemment dans ses vers. Ces éléments, bien qu'apparemment liés à des plaisirs terrestres, symbolisent en réalité des concepts plus profonds, notamment la recherche spirituelle et l'amour divin. Par exemple, le vin représente souvent la connaissance spirituelle, tandis que l’ivresse est synonyme d’extase mystique et de l’oubli de soi en Dieu.
« Si le vent passe au jardin, cueille une rose,
Elle est le miroir des visages joyeux. »
Un point particulièrement intéressant de ses vers est qu’en raison de leurs natures allégoriques et énigmatiques, le Divân a fait l’objet de nombreuses interprétations au fil des siècles. Certains y voient une expression de la quête spirituelle, tandis que d'autres y lisent des poèmes d'amour plus littéraux. La beauté du Divân réside précisément dans cette ambiguïté, qui laisse place à une multitude d’interprétations personnelles. Enfin, Le Divân de Hafez n’est pas seulement un recueil littéraire, il est un texte sacré pour de nombreux Iraniens. Il est utilisé de manière presque divinatoire : on pratique souvent ce que l’on appelle le fāl-e Hafez, une méthode de consultation où l’on ouvre le Divan au hasard pour obtenir des conseils ou des réponses à des questions personnelles.
Héritage
Hafez est mort à Shiraz en 1390, laissant derrière lui un monumental héritage littéraire. Après sa mort, sa réputation n'a cessé de croître. Son mausolée, situé à Chiraz, est un lieu de pèlerinage pour les amateurs de poésie et les admirateurs de son œuvre. Des siècles après sa disparition, ses vers continuent de résonner en Iran et dans le monde entier.
"Les poèmes que j’écris perdureront, leur flamme vivra dans les cœurs des hommes, longtemps après que je sois parti."
Il le savait, Hafez laisse une empreinte indélébile sur la poésie persane. Il est souvent comparé à des poètes comme Saadi et Rumi, mais Hafez a su trouver un style distinct, marqué par sa maîtrise des formes et des images et qui a su immortaliser les questions éternelles de l'amour, de la spiritualité et de la quête de sens.
Sources :
https://shs.cairn.info/revue-philosophique-2012-1-page-61?lang=fr
https://fr.wikipedia.org/wiki/Hafez_(po%C3%A8te)
http://www.teheran.ir/spip.php?article448#gsc.tab=0
https://lequotidien.lu/culture/en-iran-la-bonne-aventure-se-dit-en-poesie/
https://www.librairieclareton.fr/livre/23528711-le-livre-d-or-du-divan-hafez-segher
https://discover.hubpages.com/literature/A-Glimpse-Into-The-Life-and-Poetry-of-hafezHafiz
https://fr.irandestination.com/poetes-persans/
https://fr.wikipedia.org/wiki/Div%C3%A2n_de_Hafez