La démocratie au service d’un nouveau monde

La démocratie au service d’un nouveau monde

En 2024, plus de 4 milliards de personnes vont voter dans 68 pays différents. Cette année marque une ère sans précédent dans l'histoire de la démocratie mondiale. Alors que plus de la moitié de la population mondiale est invitée à exprimer sa voix à travers les urnes, cette vague électorale va profondément changer le visage du monde dans les années à venir et plus particulièrement celui du Proche et Moyen-Orient.



Un nouvel air se profile en Turquie

La Turquie est un pays de plus 85 millions d’habitants à la jonction de l'Europe et du Proche-Orient, lui offrant ainsi une position géo stratégique très avantageuse. Dans ce pays tenu d’une main de fer par Erdoğan, les élections municipales de 2024 ont marqué un tournant majeur dans la dynamique politique, révélant une opposition capable de remporter des victoires majeures dans des bastions historiquement fidèles au parti au pouvoir. Le Parti républicain du peuple (CHP), principal parti de l'opposition, a remporté des victoires notamment à Istanbul (fief de Erdoğan) et Ankara, les deux plus grandes villes du pays.

Cette élection est un revers majeur pour le président Recep Tayyip Erdoğan, au pouvoir depuis 10 ans, et son parti, l'AKP (islamo-conservateur), qui ont dominé la politique turque depuis 2002. Les implications de ces résultats municipaux sont profondes car lors des prochaines élections présidentielles, Ekrem Imamoglu, le maire d'Istanbul et opposant principal de Erdoğan, pourrait se poser en sérieux concurrent. De plus, ce changement de régime pourrait profondément changer les relations internationales de la Turquie, notamment avec l'Union européenne et les États-Unis, et la gestion des crises régionales comme celles en Syrie, en Arménie ou en Irak.

En Iran, un souffle démocratique sur les braises de la révolte

À 2400 km d’Istanbul, à Téhéran, les élections législatives de 2024 se sont déroulées dans un contexte de très forte tension sociale. En effet, le scrutin a vu une victoire sans surprise des conservateurs. Néanmoins, le peuple iranien à largement boycotté les élections pour manifester sa profonde colère envers le régime théocratique actuel. Le double scrutin destiné à élire les 290 députés et les 88 membres de l’Assemblée des experts n’a mobilisé que 41% des électeurs. C'est la participation la plus faible depuis la révolution de 1979 !

Les conservateurs, soutenant le gouvernement du président Ebrahim Raïssi, restent très largement représentés au Parlement. Cette domination est un signe que malgré les crises internes, notamment les mouvements de protestation déclenchés par la mort tragique de Mahsa Amini en 2022, le régime continue de maintenir une main de fer sur la politique iranienne et farouchement réprimer les mouvements contestataires. Ce scrutin pourrait également avoir des implications importantes pour l'avenir politique de l'Iran, notamment en ce qui concerne l'Assemblée des experts, qui est chargée de désigner le guide suprême et préparer la succession l'ayatollah Ali Khamenei ayant 84 ans.

Cependant, et bien que les conservateurs maintiennent le contrôle, la faible participation et le nombre élevé de bulletins blancs sont l'expression directe d’une remise en question de la légitimité du parlement et, par extension, du régime lui-même ! En Iran, sous ce régime, ce qui compte n’est pas tant les résultats des votes mais plutôt ce qu’ils représentent : un fossé grandissant entre la population et les dirigeants. Ainsi, à l’heure ou la région est plus instable que jamais, que l’Iran multiplie provocations et attaques, le peuple Iranien est sans aucun doute l’une des principales portes de sortie de la crise régionale actuelle.  

Les États-Unis ont leur destin entre leurs mains

Les élections présidentielles américaines de novembre 2024 sont cruciales pour l'avenir de la démocratie aux États-Unis et pour la stabilité internationale, notamment au Moyen-Orient. Les États-Unis tentent depuis plusieurs années d'accroître leur influence au Moyen-Orient avec des accords militaires et commerciaux tout en entretenant une relation historique très étroite avec Israël. Les prochaines élections présidentielles sont déterminantes pour l’impact qu’aura la politique de la première puissance économique et militaire du monde sur cette région du monde.

De manière générale, Biden favorise le multilatéralisme et la coopération internationale et souhaite que les États-Unis reviennent à une approche plus traditionnelle de sa politique étrangère en réduisant l'engagement militaire direct dans la région, comme le retrait d'Afghanistan. Trump a quant à lui une vision différente. Sa politique "America First" a encouragé un retrait des accords internationaux et des organisations mondiales, comme les accords de Viennes. De plus, il a favorisé des relations fortes avec Israël, reconnaissant Jérusalem comme sa capitale et promouvant les Accords d'Abraham entre Israël et plusieurs pays arabes, tout en adoptant une position dure contre l'Iran.

2024 est et sera une année élective sans précédent, marquant une période de transition significative pour la démocratie mondiale. Ces élections, couvrant des contextes géopolitiques variés de la Turquie à l'Iran, et jusqu'aux États-Unis, ne sont pas seulement un baromètre de l'état de la démocratie dans ces pays, mais aussi des points de bascule pour les relations internationales et la stabilité du Moyen-Orient.

Sources :

https://www.lemonde.fr/international/article/2024/01/06/2024-annee-electorale-record_6209359_3210.html

https://fr.statista.com/infographie/31636/carte-des-pays-avec-des-elections-nationales-en-2024/

https://www.courrierinternational.com/grand-format/infographie-quels-pays-votent-en-2024-et-quand-votent-ils

https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/elections-aux-etats-unis-russie-ue-ces-8-scrutins-de-2024-qui-pourraient-tout-changer-dans-le-monde-2043828

https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/2024-lannee-de-tous-les-scrutins-2044449