Séminales langues sémitiques : patrimoine de l’humanité

Séminales langues sémitiques : patrimoine de l’humanité

« Tels sont les descendants de Sem, selon leurs familles et leurs langues, selon leurs territoires et leurs peuplades » (Genèse, chap. 10, verset 31)

A l’origine, une histoire de famille


Les langues sémitiques reflètent l’histoire de l’humanité. Nées en Afrique et au Proche-Orient, berceaux de cette dernière, elles sont à l’image d’une grande famille qui rassemble des patriarches vénérables plus ou moins tombés dans l’oubli mais dont le testament écritdemeure, des descendants issus d’une renaissance bien ancrée dans la modernité, ou bien encore des héritiers restés fidèles à la première lignée.

En effet, l’égyptien des hiéroglyphes, l’assyrien cunéiforme, le phénicien ou bien l’araméen sont autant de langues « mortes » dont subsistent, gravés ou dessinés, les symboles qui donnèrent progressivement naissance à l’alphabet hébreu, arabe ou amharique. L’hébreu, l’arabe et l’amharique, bien « vivantes », sont parlées, écrites et lues du Maghreb au Golfe Persique, en passant par la Corne de l’Afrique ou le Levant.

Le fils de Noé, Sem (« nom » en hébreu), en serait l’ancêtre commun et aurait transmis, comme autant de gènes en partage, le recours aux racines trilitères, aux consonnes fricatives et à une transcription de droite à gauche.

Langue liturgique, langue vernaculaire


Indissociable du judaïsme et de l’islam car langues d’écriture de leurs Livres respectifs, l’hébreu et l’arabe n’ont pas connu les mêmes méandres de l’histoire. Resté au temps de la diaspora la langue liturgique du peuple juif, l’hébreu ancien ou biblique ne rentre dans la modernité que sous l’impulsion d’Eliezer

Ben-Yehouda au XIXe siècle, avant d’être adopté comme langue officielle par le jeune Etat d’Israël à sa création en 1948. Mâtiné d’espagnol, d’allemand et d’arabe, il avait par ailleurs donné naissance, plusieurs siècles auparavant, à des dialectes régionaux (ladino, yiddish, judéo-arabe). Aujourd’hui, l’hébreu est parlé par plus de 9 millions de personnes dans le monde.


L’arabe classique ou littéraire naît avec le Coran au VIIe siècle dans la région qui lui a donné son nom, l’Arabie, et n’a connu aucune modification depuis. Langue de poésie, d’érudition et de science, il est à distinguer de ses variantes dialectales, aussi nombreuses que les pays de la zone arabo-musulmane.

Avec l’expansion de l’islam, son alphabet a été adopté par des langues indo-européennes comme le farsi ou l’ourdou. Parmi ses 400 millions de locuteurs,
on compte également les chrétiens du Liban, de Syrie, d’Irak, d’Egypte et de Terre sainte qui, eux aussi, en ont un usage liturgique mais le couplent à d’autres langues sémitiques anciennes et en voie de disparition comme l’araméen ou le copte.

Parler la langue de l’autre : un héritage en partage


Dans la région, Israël a aussi fait de l’arabe l’une de ses trois langues officielles. La littérature israélienne est riche d’exemples d’appropriations linguistiques et d’œuvres métissées, telles celles de l’écrivain d’origine palestinienne Anton Shammas, connu pour ses nouvelles, poèmes et articles ainsi que ses traductions de l’arabe à l’hébreu.

A Jérusalem et Tel Aviv, l’organisation A.M.A.L (« espoir » en arabe) fondée par le bien-nommé Ishmael Ben Israel, mandate des étudiants palestiniens pour aller enseigner l’arabe dans les écoles primaires et propose des cours par une plateforme en ligne à des milliers d’étudiants.

Cet intérêt grandissant pour l’apprentissage de cette langue s’explique par deux raisons : la curiosité à l’égard de la culture du voisin ou la redécouverte de ses propres racines pour les descendants de Juifs du Maghreb ou du Moyen-Orient.

En Egypte, les départements de langues orientales proposent l’enseignement de l’hébreu comme à l’université Al-Azar du Caire, tandis qu’à Dubaï ou à Abou Dhabi, les écoles de langue récemment ouvertes dans le sillage des Accords d’Abraham, séduisent de plus en plus les hommes d’affaires émiratis. Comme si parler la langue de l’autre s’apparentait, pour les fils de Sem, à renouer avec l’héritage que l’on a en partage avec des cousins pas si lointains.

Sources :


L’hébreu, langue mouvante d’un pays qui change (la-croix.com)


Les langues sémitiques (unige.ch)


De plus en plus d'Israéliens se mettent à l'arabe - The Times of Israël (timesofisrael.com)


Hebrew language in high demand in Gulf states – DW – 03/11/2021