Maroc : quand la tech vol au secours de l'agriculture
Avec une autosuffisance céréalière avoisinant les 75% et des produits de terroir qui génèrent un chiffre d’affaires de plus d’1,2 milliards d’euros par an, la terre du royaume est loin d’être stérile. Pourtant, depuis 40 ans, l’agriculture marocaine est menacée par une sécheresse endémique. En 2008, le gouvernement a mis au point le Plan Maroc Vert pour venir en aide aux petites exploitations commerciales. Cette décision s’est favorablement traduite par une hausse de 60% des exportations agricoles l’an suivant.
En 2023, c’est au tour des start-ups de prendre la main sur les terres arables. Tandem illustratif: Sand to Green use de sa technologie pour faciliter l’insertion des fermes agro forestières dans les environnements arides, tandis que Terraa renforce les circuits de distribution grâce à sa plateforme numérique. Comment ces deux entreprises comptent elles venir à bout des défis du secteur primaire ?
Sand to Green : reverdir le désert
Le territoire marocain est sans cesse remodelé par les mutations écologiques et urbaines du XXIème siècle. Son agriculture n’est pas épargnée. Sécheresse, étalement urbain, érosion… D’après Benjamin Rombaut, CEO de Sand to Green, près d’un tiers des surfaces terrestres seraient devenues désertiques. Afin d’adapter les pratiques agricoles du royaume, l’entrepreneur franco-marocain a décidé de déployer un modèle agroforestier en milieu aride au Maroc. Après trois ans de R&D, Sand to Green est désormais un projet mûr, prêt à contribuer à la résilience des économies rurales du pays.
Ce prototype prévoit de reverdir les milieux désertiques, notamment grâce à une stratégie de dessalement d’eau. Cette procédure permettrait d’aider les arbres à s’implanter dans un environnement hostile et peu irrigué. “À mesure qu’ils se fortifient, ils deviennent de plus en plus autonomes grâce à leur capacité à gérer leur propre cycle de l’eau” détaille un Benjamin Rombaut à la fois ambitieux et soucieux de voir éclore des végétaux en mesure de réduire les émissions de carbone. À l’heure actuelle, Sand to Green a déjà levé 1 million de dollars. Cette somme récoltée auprès des investisseurs devrait lui permettre de s’étendre sur des milliers d’hectares.
Terraa : la food tech qui cultive les réseaux de distribution
L’aridité n’est pas le seul challenge auquel le Lion de l’Atlas fait face. Le système d’achalandage est lui aussi à repenser. Intermédiations, Bases de données incomplètes et le retard technologique affectent le marché agricole et engendrent des prix excessifs, des invendus ainsi qu’une altération des aliments. Fondée en 2022, la start-up Terraa pourrait bien changer la donne. Sa mission : rétablir le réseau entre agriculteurs et marchés urbains via un système de commandes dématerialisé.
Pour y parvenir, la food tech marocaine a entrepris de s’approvisionner directement auprès des agriculteurs avant de les livrer aux revendeurs. Cette stratégie s’accompagne d’une politique de prix constants, qui tend quant à elle à limiter les pertes dues aux périodes de surproduction.
Cette année, la jeune pousse spécialisée dans la distribution alimentaire est parvenue à lever 1,5 millions de dollars de fonds de pré-amorçage qui serviront à renforcer son infrastructure logistique tout en étendant son activité dans le reste de la région. Impatient de percevoir l’impact positif que la technologie de Terraa aura sur l’offre et la demande, le cofondateur Benoît Devigne a déjà prévu d’ouvrir de nouveaux centres de collectes qui serviront au stockage et à la distribution.
Sur le terreau fertile de la collaboration internationale
Développer une économie numérique capable de revaloriser les agricultures familiales, soit, 70% des exploitations est un enjeu de taille au Maroc et dans l’ensemble du continent. L’utilisation des technologies en Afrique par les petits exploitants s’observe de plus en plus mais n’est pas suffisamment démocratisée.
S’il est désormais possible de cultiver dans les zones arides grâce aux techniques de l’agro-écologie, les centres de formation et d’experimentation sont indispensables pour aiguiller la jeune génération d’ingénieurs marocains. Pour y arriver, la participation des acteurs internationaux n’est pas négligeable. De fait, c’est la fondation française Yves Rocher qui a financé l’institut CIPA (carrefour des initiatives et pratiques technologiques) à hauteur de 10 000 euros.
Conscient de la valeur fondamentale que les partenariats internationaux peuvent apporter, le Maroc a ouvert ses portes aux collaborateurs de tous les horizons. Le royaume a ainsi récemment appelé à une coopération avec l’Europe et l’Afrique pour une agriculture durable. En octobre, il a pris part à la conférence internationale sur les technologies de production alimentaire de la mer et dur désert à Eilat. Cet événement a d’ailleurs réuni plus 70 représentants de nombreux pays - dont la Jordanie, le Barhein, le Ghana, les Émirats Arabes Unis - tous soucieux de redorer leur secteur agricole. Chacun peut apprendre de l’autre : voilà le mot d’ordre que l’on retiendra de cette rencontre historique.
Sources :
https://agriculture.gouv.fr/marocx
https://www.agriculture.gov.ma/fr/filiere/richesse-du-terroir